Vous ne voyez peut-être pas précisément qui est ce monsieur mais vous avez certainement déjà lu son nom, et encore plus certainement déjà entendu ses notes. Compositeur de musiques de films depuis le début des années 80, Hans Zimmer a signé les bandes originales de films cultes comme Rain Man, Thelma et Louise, True Romance, Le Roi Lion, Gladiator, Pearl Harbor, Pirates des Caraïbes, la trilogie Dark Knight, DaVinci Code, Inception, Interstellar... et beaucoup d'autres.
Internationalement connu et reconnu, oscarisé, friand des mélanges de styles musicaux, il figure parmi la crème de la crème des compositeurs du cinéma avec John Williams, Danny Elfman, Alan Silvestri, Howard Shore, Jerry Goldsmith, Ennio Morricone (que j'aime moins mais dont je reconnais volontiers la "cultitude"), feu James Horner et quelques autres. Et Hans Zimmer est, je l'avoue, l'un des mes préférés - si ce n'est mon préféré - parmi ceux-là.
J'ai donc logiquement fait une petite crise cardiaque en apprenant l'existence de ce concert. C'est un peu le genre de choses improbables qu'on voit en rêve : s'il m'est arrivé de rêver que je débattais de l'importance de la croûte de l'emmental avec Serge Gainsbourg (véridique), il m'aurait semblé encore plus improbable de rêver qu'Hans Zimmer ferait un concert à 10 minutes de chez moi. Je me préparais donc à entendre des morceaux que je chéris joués en direct par leur compositeur, un orchestre et une chorale, soit environ 70 personnes.
Sans plus attendre, voici la setlist, agrémentée de liens YouTube (j'ai essayé de trouver les meilleures captures mais j'ai parfois du privilégier la qualité du son) :
Miss Daisy et son Chauffeur
Driving
Sherlock Holmes
Discombobulate
Madagascar
Zoosters Breakout
USS Alabama
Roll Tide
Anges & Démons
160 BPM
The Wheat • The Battle • Elysium • Now We Are Free
Chevaliers de Sangreal
L'Histoire de la vie (intro) • Terres Interdites (chanté) • L'Histoire de la Vie (fin)
Jack Sparrow • One Day • Mutiny • He's a Pirate
You're So Cool
Main Theme
What Are You Going To Do When You Are Not Saving The World ?
Journey to the Line
The Electro Suite
Why So Serious ? • Like a Dog Chasing Cars • Why Do We Fall ? • Deshay Basara • Aurora
Day One • No Time For Caution • Stay
(Rappel)
Dream is Collapsing • Mombasa • Time
Ce qui ravit aussi chez Hans Zimmer, c'est sa sympathie. Après le premier morceau et à plusieurs reprises au cours du spectacle, il nous conte ses anecdotes intéressantes sur la genèse des bandes originales concernées et nous gratifie de quelques mots français, même si sa rencontre avec une belle anglophone a quelque peu entravé son séjour linguistique en France quand il était jeune (vraie ou pas, l'anecdote reste mignonne).
S'il demeure le "maître de cérémonie", il se révèle très humble et il n'est pas rare de le voir regarder ses compagnons de scène avec des étoiles dans les yeux et un sourire jusqu'aux oreilles. Il ne tarit pas d'éloges sur eux, d'autant que certains jouaient déjà sur les enregistrements. Quelques uns nous laissent bouche-bée : je pense à Tina Guo et à son violoncelle électrique, à Mike Einziger, également guitariste d'Incubus, à Yolanda Charles et à sa basse ou à Czarina Russell qui joue des cloches tubulaires et offre sa voix à la version scénique de la BO de Gladiator.
Un invité-surprise nous fait carrément bondir le coeur dans la poitrine, quand, dans le noir qui suit le déjà transcendant "Chevaliers de Sangreal", on entend le début éclatant de l'ouverture du Roi Lion. Ce chant africain, cette voix que tout le monde connaît : celle de Lebo M.
Du côté de la mise en scène, si on peut regretter que les cuivres soient un peu cachés, tous ceux qui peuvent bouger ont une vraie présence scénique. Deux petits éléments de décor rigolos, un shaker et un verre à martini sur le piano d'Hans, rendent la scène bondée un peu plus intime. Après une première partie uniquement habillée de lumières, certains morceaux de la seconde partie du spectacle se voient accompagnés d'animations sur l'écran. C'est là qu'on se rend compte que sans aucune image de film (sur l'écran ou dans la tête), la musique d'Hans Zimmer procure une palette d'émotions à elle seule.
Ou presque à elle seule. Le dernier morceau de la suite The Dark Knight devient un moment spécial puisqu'il sert de fond musical à un discours-hommage d'Hans Zimmer. Hommage d'abord à Heath Ledger, l'inoubliable Joker de cette trilogie mort à 28 ans d'une overdose de médicaments, puis hommage aux victimes de la fusillade qui eut lieu dans un cinéma en 2012 lors d'une première de The Dark Knight Rises à Aurora, aux Etats-Unis. Hans révèle qu'il a écrit un morceau suite à cet évènement (les recettes sont allées aux survivants et familles des victimes, mais ça il ne le mentionne pas), une musique qui symboliserait le pouvoir de sortir des ténèbres et de tendre la main vers la lumière. Malgré le fait que "le monde n'aille pas mieux", lui et tous les musiciens nous offrent donc ce morceau "de tout leur coeur", ce morceau que nous écoutons déjà depuis quelques minutes et qui porte à la fois le nom d'une tragédie et celui de la lumière qui perce l'obscurité : Aurora.
Parfaitement équilibrée entre compositions récentes et anciennes, poignantes et légères, morceaux seuls et suites, classiques et hybrides comme Hans Zimmer les aime (rock, électro...), la setlist était parfaite. Si je pinaillais, je pourrais regretter l'absence du thème de Thelma & Louise, apparement joué exceptionnellement une ou deux fois sur la tournée. Mais je ne vais pas pinailler. Parce que ce concert dans son entier, je ne pourrai pas l'oublier.
Et sa conclusion encore moins.
Certaines compositions d'Hans Zimmer sont parfois pointées du doigt quant à leurs mélodies "simples" et leurs structures en boucle qui vont crescendo puis decrescendo. C'est ainsi qu'il a construit son concert. En le commençant par la mélodie de "Driving" (Miss Daisy et son Chauffeur) au piano, dévoilant au fur et à mesure l'étendue de l'orchestre et des choeurs. Et en le terminant par "Time" (Inception), morceau gigantesque que j'espérais entendre par-dessus tout, dont les dernières mesures de plus en plus minimalistes accouchent d'une conclusion au piano seul, jouée ce soir-là devant un public religieusement silencieux. C'était la plus belle fin possible, pendant laquelle on aurait pu entendre une toupie tourner.
Les photos de cet article ne m'appartiennent pas.
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